Faits saillants
La situation sécuritaire est restée calme, malgré quelques incidents liés à des tensions intercommunautaires ou des actes d’éléments armés.
Deux évaluations multisectorielles dans les zones de retour des femmes et enfants en situation de reddition ont souligné de nombreuses vulnérabilités et les retours probables de près de 40 000 personnes au sud du canton de Bol.
De nouveaux déplacements vers Koulkime et Kousserie, causés par un sentiment d’insécurité des populations, ont été rapportés.
117 cas de violences basées sur le genre ont été rapportés et documentés au cours des mois de janvier et de février dans les zones de Baga Sola et Liwa.
Une campagne de distribution de matériels scolaires pour tous les élèves de la région du Lac a commencé à partir de la semaine du 20 février afin d’appuyer la reprise des cours.
Aperçu de la situation
La situation sécuritaire est restée calme, malgré quelques incidents rapportés en janvier et février. Deux incidents sont liés à des tensions intercommunautaires : le 8 janvier, un conflit entre agriculteurs et éleveurs aurait causé un mort dans les îles autour de Bol. Le 16 février, des affrontements entre deux communautés dans le village Ernou, à 40km au nord-est de Baga Sola, auraient causé un mort et un blessé grave, et auraient amené les autorités à intervenir pour prévenir une détérioration de la situation. Deux incidents sont liés aux actions d’éléments armés : le 19 janvier, des membres d’un groupe armé auraient attaqué des pêcheurs dans une île entre Tchoukoutalia et Boma, causant trois morts (un membre du groupe armé et deux pêcheurs). Le 18 février, un déplacé aurait été tué à Koulfoua ; selon les autorités, cet incident aurait été causé par les membres d’un groupe armé. Par ailleurs, les mouvements militaires en cours dans la région du Lac pourraient s’accompagner d’un regain d’incidents sécuritaires, en partie dus à la création de vides sécuritaires dans certaines localités. En 2016, la recrudescence d’incidents dans la région du Lac en juin-août 2016 avait en effet coïncidé avec les opérations militaires de la Force Multinationale Mixte.
La situation relative aux personnes en situation de reddition est restée dynamique jusqu’à la fermeture du site de Baga Sola. Les vagues de reddition de faible ampleur ont continué en janvier : ainsi, 4 personnes se seraient présentées le 9 janvier, 12 personnes le 10 janvier, 8 personnes le 27 janvier, et 3 personnes dont une femme et un enfant le 30 janvier, ces derniers ayant été directement remis à leur chef de canton d’origine. Au total, depuis juillet 2016, plus de 1 200 personnes se seraient ainsi présentées aux autorités. Ces personnes sont désormais dans leurs villages d’origine. En effet, depuis le 20 février, les hommes en situation de reddition encore retenus sur un site à Baga-Sola ont été autorisés par les autorités à rejoindre leurs familles dans leurs villages d’origine. Il leur aurait été remis une autorisation écrite qui permettrait leur identification et leur suivi. Cependant, leur statut n’a toujours pas été déterminé. Selon les autorités locales, ce retour d’hommes en situation de reddition pourrait présenter des risques de protection supplémentaires, mais aussi faciliter la réintégration des familles au sein de leurs communautés d’origine.
Par ailleurs, sur la période du rapport, deux évaluations multisectorielles ont été réalisées dans les zones de retour des femmes et enfants en situation de reddition. Une évaluation rapide réalisée par le Programme Alimentaire Mondial (PAM), la Délégation régionale des Affaires Sociales (DRAS) et l’ONG Initiative pour l’Humanitaire et le Développement Local (IHDL), les 12 et 13 janvier, dans les zones insulaires au sud de Bol, a rapporté des besoins multisectoriels, notamment en sécurité alimentaire. En effet, les faibles stocks de vivres et les revenus insuffisants entrainent l’adoption de stratégies de survie négatives (réduction du nombre de repas par jour, emprunt d’argent, etc.). Selon l’évaluation, les femmes et les enfants retournés dans leurs villages d’origine n’auraient pas été confrontés à des problèmes d’intégration, mais des cas de stigmatisation requièrent un suivi spécifique.
Suite à cette mission, et sur recommandation de l’Equipe Humanitaire Pays, une mission d’évaluation multisectorielle a été organisée du 10 au 14 février afin d’évaluer les conditions de retour des personnes en situation de reddition transférées dans leurs villages d’origine et d’identifier les besoins humanitaires de la population dans les zones de retour. La mission estime que quelque 40 000 personnes sont retournées dans les 14 villages et sites dans la souspréfecture de Bol, y compris les zones insulaires.
Le principal besoin des populations reste l’alimentation et les moyens d’existence, qui ont été sévèrement affectés par la crise. Le besoin en articles ménagers, surtout en couvertures, a été exprimé. La vulnérabilité des populations est exacerbée par les restrictions de mouvements liés à l’application des mesures de l’état d’urgence (malgré son expiration depuis le 24 octobre 2016) ainsi que par le faible accès aux services essentiels tels que centres de santé, écoles et l’accès limité à l’eau potable et à l’assainissement. Malgré l’absence de problèmes de protection spécifiques aux personnes en situation de reddition retournées dans leurs villages, il a été rapporté de nombreux incidents de protection, en particulier des violences basées sur le genre, qui requièrent une assistance spécifique. En ce qui concerne les personnes en situation de reddition, un appui psychosocial devrait être envisagé pour répondre aux traumatismes vécus. Un plan opérationnel a été développé pour mobiliser les efforts en vue d’une réponse commune aux besoins multisectoriels dans la cuvette sud du lac. Les difficultés d’accès aux îles ont été la principale contrainte rencontrée par la mission et risqueraient d’avoir un impact sur l’acheminement de l’assistance aux populations.
La matrice de sévérité des besoins multisectoriels souligne une situation particulièrement critique pour les sites visités dans les zones insulaires. Deux villages, Medi Kouta et Nahr, sont les plus vulnérables. La plupart des sites visités enregistrent une vulnérabilité sévère en éducation, et une situation critique pour l’accès à la santé, à l’eau et à l’assainissement, ainsi qu’à des mécanismes permettant d’assurer la protection.